Un second souffle [ft Eva]

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T’es dans les meilleurs. Et en plus de ça, t’es un.e gros.se insociable de première quand tu le veux : à la fac, t’es juste là pour bosser. Tu ne veux pas spécialement d’ami, tu t’en feras en dehors. Et il faut croire que vouloir rester seul est un crime hautement puni par la loi de ce monde.

Tu ne comprends pas bien les codes de ce monde, dû à l’extrême violence qui a rythmé ton enfance. Est-ce normal, ce qu’il t’arrive, là ? Les humains sont-ils toujours pareils ? Ont-ils tous un immense besoin de te frapper, de te ramener plus bas que terre, de te cracher à la gueule, faire comme si tu n’étais moins que rien à leurs yeux ? Il semblerait que la réponse à toutes ces questions soient : oui. Mais tu préfères ne pas t’emporter contre eux, ce ne sont encore que de petits humains, puis, ce n’est que toi. Ils ont le droit de te faire du mal, et ça ne te dérange pas tant que ça : ils ne frappent pas fort. Ils sont franchement petit joueur à côté de ton bourreau.

Tu restes donc en boule, sans un mot, sans une larme, à simplement te faire insulter gratuitement, ou frapper, ou tirer les cheveux. Ils espèrent que tu redresseras la tête. Ils espèrent que tu les regarderas en face, mais rien n’y fait : tu ne bouges pas d’un poil. Tu restes dans la même position : et si ça les frustre, tant mieux. C’est le jeu, ma pauvre lucette. Ce que tu te demandes, c’est combien ? Combien de personnes sont passés sans rien dire, sans oser intervenir ? L’harcèlement est définitivement une des plus belles images qui soient pour illustrer ce monde : ils regardent, ils voient, ils parlent, disent que c’est mal, collent des pancartes, mais n’agissent pas. Ils n’agissent jamais.

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Et enfin, tu esquisses un mouvement. Tu redresses doucement la tête, plantes ton regard dans celui de ton harceleur, puis le porte sur la démone. Cette aura. Cette prestance. Ce visage. Cette voix que tu distingues nettement. Ce tact. Ces menaces. Tout ce qu’elle dégage est magnétique. Hypnotisant. Captivant. Enfin bref, tout un tas d’adjectif. Et ton langage est bien trop limité pour tous les utiliser. Le groupe s’enfuit, ne pipant pas un mot de plus.

Et ton visage s’éclaire à nouveau, un sourire étire tes lèvres tandis que tu te relèves. Pas un bleu. Pas une égratignure. Rien. Tu sors un petit air de chien battu de ton sac, et tu geins un : « Hé, c’est méchant ça ! » Grimace rapidement effacée, tu reprends ton sourire et affirme avec un petit peu plus de mordant : « T’as niqué mon expérience sociale. J’me demandais combien de temps ils pouvaient tenir avant d’en avoir marre. Jusqu’où va l’horreur humaine. Mais bref, on s’en fout ! »

Tu t’approches d’elle, t’arrêtes à son niveau. Tu gagnes en malice, approches ton visage de son oreille, le passant juste au-dessus de son épaule : « Le plus étonnant, c’est que la seule personne qui ait daigné me venir en aide soit une démone. T’as eu de la pitié ? Je suis flatté.e~ »

Putain mais la bombe. T’as tellement envie de lui proposer un shooting. Bon, après, t’as un peu envie d’en proposer un à chaque personne que tu croises… Mais elle, il y a vraiment un truc. Puis, tu es pratiquement certain.e que tu pourrais voir pour un peu de nu… Non, rien de pervers ! Tu trouves simplement que ce sont les plus belles photos, que c’est le plus intéressant à exploiter. C’est tout !

« Ou alors, t’as fait ça pour que je te doive une belle chandelle, et t’as eu raison. Qu’est-ce que madame veut en échange de ses services de justicière ? »

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ESuper. Voilà que tu te retrouves à devenir le joujou d’une démone. Si tu n’avais pas un minimum d’instinct de survie, tu aurais probablement soupiré. Ce n’est pas que tu as d’autres chats à fouetter, ce n’est pas non plus que tu manques d’originalité, c’est simplement que tu sais qu’au grand jamais tu ne pourras satisfaire les envies de jeu de ce chat-là. Tu le sens. Elle est dangereuse. Tes poils se sont dressés dès qu’elle s’est approchée, tout ton être a voulu se mettre en état d’alerte. Ça va que tu n’écoutes jamais ce genre de signaux sinon, tu aurais probablement fui en même temps que tes harceleurs parce que tu sais que trop bien qu’elle est bien plus dangereuse que tous ces types réunis.
Mais voilà. A la place, tu te retrouves à devoir jouer avec elle. Tes mains s’unissent derrière ton dos, tu te mets à avancer, tourner autour d’elle : « Hmm… Laisse-moi réfléchir ! »

De toute façon, tu n’es pas du genre à parler. Ou c’est uniquement pour gagner du temps dans des situations qui l’obligent. Ou pour t’amuser à faire tourner les gens en bourrique mais ça, tu vas éviter de le faire avec elle, vraiment. Te tenir un peu, c’est le plus important : « Te donner de quoi te contenter alors que je ne te connais pas, c’est foncer tout droit dans le mur. Alors on va le faire à ma façon et on verra bien si ça te contente ~ Un shooting gratos, ça te dirait ? Je suis un bon photographe. Tu choisis le thème, on va où bon te semble et on fait ce que tu veux ~ »

C’est dangereux ça. Tu le sais. Elle peut te trainer n’importe où. Mais tu aimes le grand frisson ~