Alerte à la clope ▬ Stanislas

 
La soirée d'avant avec Grace m'a fait énormément de bien. Même si elle a réveillé ce qui fait mal au passage. Mais je ne pensais sincèrement pas me faire une copine de galère comme ça. Comme quoi la vie est pleine de surprises. Ça fait du bien de lier avec des gens qui nous comprennent.

Aujourd'hui, j'ai pris la journée pour réfléchir et me ressourcer. J'ai trop foncé tête baissée ces derniers temps, probablement parce que je suis trop souvent sous l'eau, mais ça ne m'a pas servi. Je pense que c'est le bon moment pour m'arrêter cinq minutes ou vingt-quatre heures pour me reprendre en main. Me reconnecter avec la réalité et ce qui est faisable dans la limite (et dieu sait qu'elle est petite) de mes capacités.

J'en suis venu à la conclusion qu'il faut que je gratte dans des domaines où j'ai déjà des affinités. Que je vise de façon plus ciblée. Je sais pas encore quoi. Je sais pas encore où. Mais j'ai déjà un bout du comment. Peut-être que je pourrais travailler en tant qu'archiviste cinéaste ou je ne sais quoi. Un truc où je suis vraiment calé. Et que je continue de postuler dans des petits postes dans la restauration. Même si je suis maladroit comme une clenche et que je risque de me faire virer le jour même à chaque fois.

Je n'en suis pas encore à l'étape de devoir ravaler mon orgueil pour demander de l'aide à mon père quoi.
Alors un journal à la main et un stylo dans la poche de la veste, je me dirige vers un bar assez chill. Je compte pas picoler, plutôt faire la grille des annonces avec un bon café. Je suis quelqu'un de manuel moi, les trucs comme Indeed et tout ça me convient pas trop.

Les bars me permettent d'avoir chaud, de me sentir en sécurité et de charger mon téléphone. C'est exactement ce qu'il me faut pour travailler à... trouver du travail. Pour ma petite Alex.

Et là, à quelques pas du bar, j'ai une envie pointante. Pas de pisser non. Mais de cloper. Je sors mon briquet, cale mon journal sous le coude pendant que ma main libre vient chercher une gauloise...

... Et tombe sur rien du tout.

Oh merde. Je suis déjà à court de clope ? Merde. Merde.
J'ai la peau qui picote nerveusement. La vie a été encore plus stressante récemment que d'habitude, j'ai pas vu mon stock filer. J'ai besoin d'une clope. Oh putain.

 
Et au moment où je pensais que la crise de manque allait me submerger, un sauveur en habits chicos débarqua tel un ninja avec une sainte clope. C'était inespéré. Certes il m'aurait juste fallu faire demi-tour pour acheter un paquet dans le commerce le plus proche. Mais ce genre de crises aussi énervées étaient très dures à gérer. Il m'a épargné littéralement un sale quart d'heure à devenir irritable pour rien. Dès les premières bouffées, le manque se calme et la fumée s'installe puis se dissipe, le stress avec.

- Waw merci... J'avais pas prévu de tomber en rade comme ça.

Je souffle un nouveau nuage de tabac à sa question, plus un soupir à vrai dire. Je souris-grimace en coin.

- C'est gentil de vous inquiéter. Aujourd'hui ça va... Disons que c'est plutôt la période qui est compliquée. Mais euh, heh, la vie quoi ?

Je réajuste mon journal sous mon bras.
En vrai malgré ma situation, récemment la vie a quand même eu des trucs sympas pour moi. Enfin, j'essaye de tirer le positif de ce merdier autant que je peux quoi.

- Je vous offre un verre après la clope ? Merci encore au fait !

Je me sens d'humeur à faire quelques bonnes actions, surtout qu'il a été super sympa !

 
J'allais protester à son invitation avant qu'il ne me stoppe. Mais trop sympa le gars ! Je pensais pas que ça existait encore. Entre hier et aujourd'hui, je suis vraiment garni avec les bonnes âmes. Sans parler de la policière d'il y a quelques jours.

Stanislas ! Il a bien une tête à s'appeler Stan en effet.

- Voyons, je suis sûr que ça doit pas être si crampant que ça...

Je passe mon journal sous le bras clopeur pour lui tendre une main à serrer.

- Roland, enchanté !

Je souris naïvement.

- Ça vous arrive souvent de dépanner un quidam paumé comme ça ?