Tout ceci ne mérite pas un ban(c), il est innocent

Je l’écoute, il semble assez mature pour dire que mes goûts et les siens, ça nous regarde. Donc il ne sera pas du genre à faire une tonne sur un sujet complètement futile. Je n’ai pas de quoi projeter sur un mur entièrement blanc. J’aime bien ma petite télévision connectée. Elle me permet tellement de choses que parfois, je m’y perds. Les vieux films sont sympas, il y a de belles choses dedans. Et de moins belles. Chacun y trouve ce qu’il veut dedans. Parfois, c’est flou.

Alors qu’il semble avoir fait son choix, le genre du film ne me dit rien qui vaille. Pourtant, je pense que je peux laisser sa chance à quelque chose avec le genre thriller. Il peut y avoir des bonnes surprises. Je m’installe confortablement. Mon habitude, de me rouler tel un taco dans un plaid ressort.

« Cela me va, je vous avoue que je ne l’ai pas vu non plus. Je vous fais confiance. Vous semblez vraiment aimer les films. C’est vraiment beau. »

J’ai failli ajouter que son ancien travail lui manquait. Mais ça aurait été un peu maladroit de ma part de dire ce genre de choses. Je préfère le voir sourire. L’amour du cinéma en moi n’est pas égal à mon amour des chiens. D’ailleurs, dès qu’il y a un chien dans l’image d’un film, je regarde. Je sais, parfois, c’est mignon. Parfois non. Je me souviens du frisson que j’ai eu en regardant « Je suis une légende ». Pas un frisson agréable. Plus de tristesse. Cet homme avait tout perdu. Tout. Même son adorable chien.

« Vous êtes le genre de personne à grignoter pendant un film ou non ? Avant que vous ne le lanciez, il serait dommage que je casse ce genre d’habitude. J’ai des mouchoirs pas loin. Et un autre plaid si vous voulez. »

Je préférais ne pas manger en regardant un film. Ça gâchait un peu mon expérience. Le bruit de mastication et tout ça. Je crois que c’est ça qui a fait que je ne suis pas trop pour aller au cinéma. Sauf exception.  

codage par Laxy.

Sa vie avant la rue était bien emplie. Remplie de sa passion. Il est dommage que les nouvelles technologies l’aient mis à mal. Quand on parle d’habitude de regarder un film. Je ne sais pas trop où me poser. Ça dépendait du moment et surtout de l’endroit où j’étais.

« Moi ça dépens de l’endroit où je suis. Typiquement ici. Je vais me contenter de boire une boisson chaude. Je mange assez peu devant un film. Ou que des trucs que je peux laisser. Comme des pop-corns ou des bonbons. Alors qu’au cinéma, ça sera de l’eau exclusivement. »

Parler de mes habitudes me permet de voir que je ne suis pas très soda sucré. Parce que les bulles me grattent la gorge. Ou que j'aime pas quand c'est trop effervesant. Certaines boissons, ça passe.

Alors que le film se lance, je suis étonné par ces crédits assez ternes. Je me dis que je ne vais pas voir quelque chose de joyeux. Je resserre contre moi mon plaid. J’aime les histoires joyeuses, mais je n’ai rien contre les drames. Je pends un mouchoir au cas où.

Si le commencement ne présageait rien de très joli. La suite ne m’encourage pas dans le bon sens. Cet homme souffre clairement de stress post-traumatique. Ça se voit. Il est trop nerveux pour être sain. Ou c’est un tueur en série. Mais je penche pour la seconde option. Il n’a pas ce côté fou qu’a ce genre de tueur. Il a plus la tête d’un animal blessé au plus profond de son être. Il semble vivre pour un jeu de cartes. Les cartes, j’avoue que ça me passe un peu au-dessus de l’esprit. J’y fais attention quand un enfant veut m’impressionner avec un tour de magie. Mais à part ça. Non.

Le film poursuit sur des scènes où on le voit jouer, puis aussi sur son passé. Mon poing se resserre. Tout ça s’est passé sans que je ne sois au courant plus que ça ? Sans que Rakel ne soit au courant ? Mais quels monstres ! Oser maltraiter ainsi les prisonniers, c’est inhumain. Je comprendrai jamais que certains aiment ça. C’est horrible. Le plan focal n’aide pas. Vraiment pas.

Le chien ! Là, je serre si fort mon plaid que je me demande comment il est encore entier à ce stade.

Je suis outrée, scandalisée par ce que je viens de voir. Le pire, c’est que ce lieu existe. Loin des rues de Chicago que j’ai quitté. Mais ça existe. Je déteste les USA. Vraiment. Et ce n’est pas ce joueur qui le scande comme si c’était un cri de victoire n’arrange rien. Qu’il soit heureux. Loin des traumatismes de cet homme. Vis ta vie, monsieur que je ne connais pas. Ukrainien. Ah… Assez actuel tout ça. Vis ta vie en t'exultant.

Je crois que ça va mal tourner. Le gamin qui débarque tel un diable dans une boite. Et ce n'est pas très gentil pour les démons qui ne sont pas si méchants. Puis le fait que le jeu semble être sa seule échappatoire à ce qui lui torture. Il est perdu. Il essaye d’aider l’enfant. Mais plus on avance dans le film. Plus, je sens une colère monter en moi. Une colère que je ne peux éternellement cacher. Je déteste les injustices. Mon impuissance face à ce cas. Mon ignorance. Celle qui m’a conduit à apprécier mon métier. Et ne parlons pas du trafic d’uniforme. Qu’un enfant se déguise en policier, ça passe. Mais j’ai du mal quand c’est des gens plus âgés. Même si ça vient de fiction.

Je me lève soudainement puis sans un mot, je quitte la pièce. Je ne veux pas impacter cet homme avec ma colère. La meilleure façon que j’ai pour expulser ma colère hors de crier, c’est de frapper un sac de frappe jusqu’à l’éventrer.  

codage par Laxy.

Je me sentais mal pour ce pauvre gars, presque autant que celui que j’aide. Je me mets à frapper sur un sac de frappe. Je ne sais plus quel est le génie m’avait offert ce sac. Mais c’était une très bonne idée. Je me sens si en colère que chaque coup est ponctué par un cri qui se voulait léger. Sauf que je ne mesure pas cette colère qui m’habite en ce moment. Par le film, par ce qui se passe dans le monde et surtout dans cette ville. Je sais que c’est un mal nécessaire pour que chaque personne puisse trouver un genre de film qui lui plaît. Mais le drame a tendance à me rendre chèvre.

Un autre impact, qui me fait lâcher un autre cri. Puis le suivant, aussi vif que celui d’avant. Puis je sens plus que je vois que le sac a fini par se déchirer. Lâchant une matière grisâtre qui ne semble pas organique. Je lâchais un soupir. Me calmant un peu sous l’effet de cette vision. Le pauvre sac de frappe est bon pour la poubelle.

« Hum… Ça va… Je crois... »

Je sors de la pièce, laissant la personne dans la maison voir l’ampleur des dégâts de mes coups. Je me savais forte. Mais je ne savais pas que je pourrais casser ce cadeau. Je passerai commande pour un nouveau. C’est une sécurité en cas d’un autre moment de colère. Sans ça, il était plus décoratif. Comme une bouée de secours. Je passe un peu d’eau sur mon visage.

« Vous avez stoppé le film ? »

Question purement rhétorique. Parce que je me doute qu’il ne le laisse pas aller alors que nous ne sommes pas devant. Moi, je n'ai aucune envie de reprendre. Je ne sais pas comment lui dire. Je respire quelques instants. Autant y aller franco.

« Je pense que continuer ce film ne me serait pas favorable… Je m’en excuse. »

Je reste franche, bien que je mentais parfois pour mon travail. Seulement, je reste très franche.

codage par Laxy.

Je ris doucement. Je ne frappe jamais les gens qui ne le mérite pas. Il faut être la pire des raclures pour que je frappe. Je me souviens du dernier. Un petit ami toxique qui vampirisait sa moitié. Une façon de garder pour lui seul la personne sous son contrôle. Un contrôle qui était difficile de défaire tellement les gens s’étaient lié plus ou moins de façon consentante. Aussi bien la victime que celui qui était celui qui était l’agresseur. Je ne prends pas en pitié longtemps ce genre de personnes.

« Hum, que dites-vous de la cité de la peur ? Ou une autre comédie légère ? Je n'ai pas envie de voir du drame, ce soir. Ou des enquêtes policières. J’en vois trop à mon travail. Pardon, si je suis exigeante. Dans d’autres moments, ça ne me dérange pas vraiment. »

Mais les affaires lourdes semblent s’enchaîner. Je me doute qu’il y ait anguille sous roche. Je ne dirai pas un démon, je ne vais pas pousser jusque-là. Puis certains sont acceptables sûrement. Je n’en croise pas tant que ça. Je pensais à ses enfants dont je me suis occupé. Je ne peux pas voir le mal comme les Eagles. Car les enfants n’ont souvent pas demandé à naître avec une ascendance pareille.

« Ou vous avez une autre idée. Dans le thème de la comédie. J’ai envie de rire. Même d’un truc sans sens. Mais pas au point d’être dérangeant. Je sais que certains fils japonais sont comme ça. Mais je n’ai pas envie de ce point de surréalisme. »

Je fais un peu de thé, paraît que ça détend. Même si je suis plus café. Le thé pourra peut-être calmer ce qui reste dans la tempête qui s’était éveillée en moi. Je me sers une tasse.

« Un peu de thé ? » 

codage par Laxy.