Tempéraments de glace ⌖ Aanya

...

Ce culot.
Ce n'est pas plus l'insulte que l'attitude ou encore la pichenette digne de celles réservées aux insectes qui était éberluant.

D'où est-ce qu'ils l'ont piochée celle-là ?

Tu la regardas s'éloigner de son pas de furie.
Un soupir sort de tes lèvres.
Elle était épuisante.

Tu ne t'amuseras pas à lui courir après.
Mais de ton côté, tu lui donnerais une deuxième chance. Tu sortis ton téléphone et l'appelas, le regard fixé sur elle du bout de trottoir où tu te trouvais.

Qu'elle te réponde ou qu'il s'agisse de sa messagerie vocale, tu avais très clairement les mots en tête.

- C'est ta dernière chance avant que je n'écrive un rapport à notre supérieure.

Tu restas encore quelques instants au téléphone, puis tu raccrochas. Tu laissas filer trois à quatre secondes puis repris la marche.
Si elle s'attire des problèmes dès ses premiers jours, ce sera son problème, pas le tien.

Tu t'arrêtas quand elle te fit face.
Tu la fixas pendant un long instant de ton regard de glace.

- Gut. (Bien.)

Un cran de tension quitta l'atmosphère sans pour autant craquer ton air austère.
Tu ne voulais pas qu'elle lise ton soulagement. Tu n'aimais pas perdre ton temps.
Tu ne sifflas pas un mot durant toute la marche. Désormais, les seules paroles que tu glisserais seraient pour lui expliquer le principe de chaque endroit et quel rôle les Eagles ont à y jouer. Ou si elle engageait la discussion, ce qui était peu probable.

Et pourtant c'est ce qu'elle fit.
Ta petite pointe avait porté. Aanya semblait ravie cependant. Tu traites sa soudaine amabilité comme avec tout chez elle : stoïcisme et neutralité. Chez elle comme chez les autres à vrai dire.

- Les deux.

Un pas ou deux. Cela semble plus détendu entre vous deux. Pour l'instant.
Tu glisses tes azurs vers les siens ; tu parles du même ton las.

- Ich spreche jedoch nicht zu 100% zweisprachig. (Cependant en parlé je ne suis pas bilingue à 100%.)

Il fallait dire que tes cousins ne passaient plus aussi souvent qu'avant dans le coin et que tes années d'allemand remontaient à loin. Mais tu comprenais très bien, comme tu l'avais laissé entendre.
Tu ne t'étalas pas plus.

- Nous voici à la première association. Soweit ? (Prête ?)

Vraiment culotée celle-là. Mais ce n'est plus nouveau, et ça ne fait que quelques minutes que vous vous connaissez. Elle sait très bien que ce serait plutôt à elle de se remettre à niveau pour ce qui est de la politesse. Et elle sait très bien que t'appâter avec la docilité temporaire d'une journée était la seule raison valable pour toi d'accepter ses conditions. Et tu le sais. Vous le savez. Nous le savons. Bref.

Tu roules des yeux, fatigué. Tu sors une petite racine de réglisse de la poche de ton veston pour commencer à la mâchouiller. T'avais décidé de faire attention à la consommation de cet aliment pour éviter les effets secondaires, mais t'as aussi décidé qu'aujourd'hui tu pouvais te le permettre. Un drôle de Lucky Luke que tu fais là mais quelle importance.

- Ok. Allons-y.

Vous avez déjà perdu assez de temps avec ses caprices. Tu regardes en arrière et décides de retourner au café où Aanya a fait sa scène - c'était le plus proche. Le serveur vous regarde avec un drôle d'air, pourtant vous n'étiez pas des clones du futur. De nouveau, tu raques. Tant pis, t'es plus à ça près.

- Tu faisais quoi avant ? , demandes-tu quand vous sortez.

À force, elle t'avait presque rendu curieux. Ou proche de ce qu'on appelle communément la curiosité envers autrui.