Et c’est vrai qu’elle n’a pas été simple, ces quelques derniers mois. C’est vrai que tu t’es volontairement éloigné d’elle ces quelques dernières semaines. Parce que ça fait mal d’être en colère contre elle, et qu’une partie de toi veut continuer à la protéger de ça. Parce que tu te dis qu’elle n’a pas besoin de toute cette colère. Que si elle fait ça, c’est pour une bonne raison… Qu’elle avait conscience des dangers en se jetant dans ce trou à rat dans lequel résidait un putain de tueur en série… Ça fait des heures, des jours, des semaines que tu tentes de te rassurer. Mais non, rien n’y fait. Pour la première fois depuis votre rencontre, tu trouves que ses agissements ont été égoïste, et surtout, dirigé par une inconscience toute particulière que tu ne lui connaissais pas. Et tout ça, en plus de te plonger dans une colère noire, te terrifie. Tu as tellement peur de la perdre. Tu as tellement peur que, comme Jack, elle n’arrive pas à se poser de limites concrètes, et qu’elle finisse par tomber sur plus fort qu’elle, et à rester coincée dans une situation similaire à celle que son aîné vit. Tu n’as jamais pensé à un seul instant que Sam ait réellement pensé d’être protégé… Et cette histoire a détruit tout ce en quoi tu croyais jusqu’à maintenant. Tu le sais, qu’elle a ses faiblesses, qu’elle est bien moins forte qu’elle le prétend, tu le sais. Mais tu ne pensais pas que c’était à ce point : sa détermination la tuera.
Cette lettre. C’est une invitation. Une opportunité en or pour tenter de renouer ce qui a été brisé. Pour tenter de passer un bon moment dans lequel tu n’auras peut-être pas besoin de boire pour te détendre un peu, comme ça a été le cas pour le bal. Un moment où peut-être, tu lui parleras franchement. Un moment où, peut-être, tu lui confiras tes craintes. Un moment où, peut-être, tu pourras à nouveau être Orpheus et non pas cet être en déperdition.
Cette lettre, elle t’a fait du bien. Et évidemment que tu acceptes son rendez-vous. Evidemment que tu lui offres cette chance de se « rattraper ». Elle la mérite. Et tu n’as absolument pas envie de l’abandonner, tu avais simplement besoin d’un petit peu de temps. Tu regardes le petit dragon qui est jonché sur ton épaule, et lui envoie un petit sourire : « Les Curtis me tueront, Lumine… Mais allez, faut se préparer p’tit gars. »
C’est habillé tout de noir que tu te glisses dans l’obscurité quelques heures plus tard pour atteindre le point de rendez-vous. Et c’est à se demander si tu ne t’es pas perdu tant cet endroit ne t’est pas spécialement familier… ‘fin, c’est paumé au milieu de nulle part quoi… Et cette pensée te tire un sourire. Non, tu es sur la bonne voie. Celle qui te mène tout droit vers Sam. C’est son genre. Elle aime tout ce qui est atypique, tout comme toi. Elle te connait. Elle a dû chercher la petite pépite de Thunder Bay dans laquelle vous serez tous les deux à l’aise. Réellement à l’aise.
Et cette petite bâtisse que tu vois au loin semble être l’endroit parfait pour ce genre de rencontres. Tu avances calmement, évitant comme à ton habitude les petites brindilles qui pourraient signaler ton arrivée.
Clac. Dès lors que tu penses un pieds sur le carrelage fort en couleur de la maisonnette, ta talonnette émet un son facilement reconnaissable, signalant alors ton arrivée. Mince. Toi qui voulais être discret. Mais tu n’as pas réellement le temps d’y penser. Milles et une étoiles brillent dans tes yeux, tandis que tu tournoies sur toi-même pour observer chaque petit endroit chaque pièce. Et tu finis par arriver dans celle où ton amie est. Ton regard se pose sur elle. Tu souris, c’est plus fort que toi. Elle est là, assise sur un petit drap… A moins que ce ne soit une nape ? Tu n’en sais rien. Les rayons de la lune l’éclaire à travers ces vitraux dont il manque quelques bouts… Elle est… Non, tu n’as pas les mots. La végétation grimpe le long des murs, provoquant en toi une excitation toute particulière, l’envie de regarder chacune d’entre elle pour en déterminer la nature, la race.
Orpheus, te rends-tu simplement compte que malgré le nombre incroyable de distraction qu’il y a autour de toi, tu es littéralement incapable de détacher ton regard d’elle ? Alors tu finis par rompre le silence : « Tu es vraiment sublime… Et cet endroit ! Je n’ai pas les mots. »