Le monde en rouge & noir ▶ Alistair

Il était encore en doute. Même si Arthur lui avait parlé, l'avait rassuré, assuré même, il n'était sûr de rien. Ses sentiments étaient toujours et à jamais ses pires ennemis. Ils n'étaient jamais sûrs, jamais constants, toujours menteurs et alliés de tout les autres autours de lui. Il savait que c'était en rapport avec sa condition de bâtard et dans ces instants il se souvenait des mots rassurants d'Arthur, de Frey faisant tant d'efforts...

Finalement, son entourage devenait de plus en plus sain. Sélène n'était plus son seul refuge. Même Liam lui faisait un bien fou avec ses idées stupides et ses lieux toujours plus improbables... Il n'avait jamais senti une telle compréhension autours de lui, et une grande partie faisait parti de près ou de loin des Bones... Alors, pourquoi pas ?

Seulement, il pensait ensuite à sa mère. Est-ce qu'elle ne serait pas en danger ? Est-ce qu'elle ne serait pas triste pour lui ? Vendre des produits aussi... désastreux pour la santé ? Mais au final est-ce que ça le concernait ? Oui... peut-être... Non ?

En tout cas, c'est bien pris dans sa réflexion, qu'il se retrouva à rentrer dans un type, littéralement, comme dans un cliché brutal et stupide. Quand il releva la tête et que la puissance du type lui vient directement dans le crâne. Il s'écarta d'un pas...

Oh merde... Automatiquement, les sensations de l'autre rentrèrent dans son corps, son esprit, son âme et son cœur... Oh non...

« ... » Il ne s'excusa pas. Ses lèvres ne voulaient pas s'ouvrir.

Il le savait. Il avait vraiment pas de chance. Plus que ça, c'était en train de rentrer dans sa chair. S'il avait pu réfléchir à cette instant, il aurait agréablement sû qu'il était en train de prendre les sentiments, les sensations, ce qui était à l'autre personne. Il se serait senti une nouvelle fois comme un voleur, comme quelqu'un qui vit à travers l'autre sans vivre jamais sa propre vie. Il ne valait pas mieux qu'un cas social sur les MMO.

Pourtant, tout ça, il n'était même pas état de se le dire. Qu'est-ce qu'il se passait exactement ? Pourquoi sa colère rentrait en lui aussi facilement ? C'était quoi cette puissance ? Contre qui il était tombé ? Il devait avoir peur. Rationnellement, il avait peur, il crevait de peur, il allait se faire tuer ! Ce mec avait clairement la possibilité de le soulever avec un doigt et de lui faire traverser la route pour trouver un boulot en face, et ça en un seul mouvement !

Il avait pas signé pour ça, il avait même pas signé du tout !

C'est pas ce que pense ton côté démoniaque, mon chou.
Et oui.
Ta mère a loupé ton éducation, mais ton père a pas loupé le trou de ta mère.

C'était pas ses pensées, c'était pas comme ça qu'il voulait penser. Il venait de se faire saigner la joue de l'intérieur pour ne pas répondre au type en face. S'il parlait, il était sûr de le provoquer, de dire de la merde.
S'il bougeait, il allait le repousser violement.
S'il tentait un truc ça allait empirer la situation.

Sa respiration était compliquée, il se retenait presque d'exister.

Mais ses pas reculaient... un minimum d'esprit de survie, et le second espoir fut de penser qu'à la limite, il prendrait un coup, pas plus.

Il ferme les yeux, essaie de se concentrer. Allez Kenny.
Allez... !

« ... » Mais putain !

Il sent son dos heurté le mur, le regard de l'homme sur lui et... Bordel de merde. Oui, il le sait. Il sait qu'en face de lui, ça peut le broyer en une seconde. Mais bordel de merde, il ressent chacune des phrases le transpercer et ça le gonfle.

Kenny est parfaitement conscient qu'il est qu'un petit bâtard de ses morts face à un grand méchant démon. Le pire ? Il ressent la colère de ce mec comme la sienne. Au fond, ça le fait chier cette merde. Pourquoi il peut pas lui-même être énervé de se faire maltraiter comme un chiot ? Il est meilleur que ça normalement non ?

Fils de pute.
Tu parles de toi là non ?

Cette fois quelque chose sort de ses lèvres, et son regard a changé, il est plus enragé.

« Grr... » Ouaip, il a grogné, mais au moins il a sorti un truc.

Respiration. Concentration sur soi-même. Tout va bien. Tout va bien. Tu n'es pas à deux doigts de te faire défoncer et tu n'es pas du tout en train d'être la personne en face de toi.

Ses yeux se ferment puis se rouvrent et cette fois son regard est neutre. Sa main se pose sur celle qui soutient son col. Il ressent encore tout, mais il arrive à ne pas être entièrement submergé.

« Je ne t'ai pas vu. »

Une phrase complète est sortie, malgré le néant construit dans son crâne.
Une chose est sûre, il ne veut pas s'excuser et ça il le sait par ce que c'est quelque chose qu'il ferait dans tout les cas... C'est comme ça que réagirait le vrai Kenny, comme ça qu'il réagirait.

Il n'est pas ce démon. Il ne l'est pas. Il n'est pas en colère. Il s'en fout, il le sait.
Mais il a aussi trop d'honneur pour fuir ou s'excuser... voilà, accuse et agit comme tu l'es Kenny !

Comme un taciturne adulescent !