Oh toi, mon bouclier social !
Feat Ezequiel
Tes yeux sont fermés, et tu attends, tout simplement. Tu attends qu’il laisse parler son talent, et qu’il te transforme. Il a toujours été doué de ses mains. Au moins, tu sais que le résultat ne sera pas moche. Au contraire, il y a de grandes chances que ce soit sublime. Autant qu’extravagant. Mais c’est le prix à payer pour passer la soirée à ses côtés. Tu sens ses mains approcher, et puis la sensation de froid sur des paupières, tandis qu’Ezequiel applique la base sur celle-ci. Un frisson parcourt ton échine, et tu ne peux pas t’empêcher de plisser le nez, pas réflexe. La sensation de te faire bichonner restera toujours étrange à tes yeux. Étrange mais agréable. L’odeur légère du produit qui chatouille tes narines. Tes muscles qui se détendent, petit à petit. Tes lèvres qui s’étirent, inexorablement, en un petit sourire amusé et cet air, que tu fredonnes, dès que ton esprit s’allège.
« Je pari qu’en ce moment même, tu tires la langue comme un crétin ~ »
Un pari que tu es sûr de remporter. Tu le connais trop bien. Et tu l’as toujours taquiné sur cette expression hilarante qu’il fait, dès qu’il se concentre sur une tâche bien précise. C’est encore plus drôle quand on pense que tu n’es pas mieux que lui sur ce point. Quoi ? Tu croyais que je ne savais pas, que toi aussi, tu as des habitudes et des mimiques étranges ? Je te vois, jouer avec le lobe de ton oreille, quand tu es perdue dans tes pensées. C’est mignon, que tu penses être discrète. Mais une grande désillusion également. Il suffit d’être un minimum observateur pour le remarquer !
Et puis, enfin, tu sens les pinceaux danser sur ta peau. Une sensation qui te rappelle de lointains et pourtant, si vifs souvenirs. Tu as l’impression que c’était hier qu’Ezequiel dissimulait vos bleus sous une couche de maquillage chapardé à votre mère. À l’époque, vous aviez trop honte. Vous aviez besoin d’effacer ce qui faisait de vos des enfants anormaux. Comme deux caméléons, vous vouliez vous fondre dans le décor. Être comme tout le monde, du moins, en apparence. Aujourd’hui, le maquillage vous met en valeur. Comme un sortilège, pour ne pas avoir peur. Assumer qui l’on est. Enfin, c’est comme ça que tu le ressens en tout cas.
« C’est agréable de se faire chouchouter de temps en temps en fait »
C’est vrai que du temps, tu n’en prends pas trop pour te pomponner habituellement. Tu as toujours 1000 choses à faire à la fois. Tu cours, sans jamais reprendre ton souffle. Les cours, la préparation de ta thèse, tes enquêtes, et tout le reste. Tu dors peu. En fait, il en a toujours été ainsi. Tu as beau t’allonger, tu n’arrives jamais à fermer l’œil, aussi simplement que les autres. Les pensées bouillonnent dans ta boîte crânienne. Tu as un tas de questions, mais aucune réponse. Tu tournes et te retournes, en boucle, et c’est ainsi que tu finis par fixer le plafond, pendant de longues heures, parfois jusqu’à ce qu’on ton réveil sonne, te relançant à toute allure dans une nouvelle journée. Mais là, tu as l’esprit en paix, étrangement. Tu profites de cet instant, dans sa forme la plus pure, sous les compliments de ton double.
« Je ne sais pas, c’est à vous que je devrais poser la question, Ézéquiel Curtis ~ »
L’avantage, c’est qu’en complimentant l’autre sur son physique, vous vous complimentez vous-même. Rien de mieux pour l’égo, tout en passant pour une personne charmante !
Enfin, ton frère éloigne ses outils, t’annonçant avec fierté que son œuvre est terminée et que tu t’apprêtes à découvrir une nouvelle version de toi. Tes yeux s’ouvrent avec une délicatesse sans nom, et tu papillonnes des cils quelques secondes, avant de baisser ton regard sur le petit miroir posé à côté de tes cuisses. L’image que tu y rencontre te prends par surprise et, précipitamment, tu ramène la surface réfléchissante plus proche de toi pour observer le résultat. Tes iris s’illuminent tandis que tu passes la pulpe de tes doigts sur la chaire de ta joue, comme pour vérifier qu’il s’agit bien de ton reflet.
« Whaou Ziel, c’est super ! Je te savais doué, mais tu as vraiment géré ! »
Il te faut quelques secondes pour détacher ton regard de cette nouvelle toi aux paupières illuminées, avant que tu ne te tournes vers ton précieux frère, un sourire bien plus grand et rayonnant scotché au visage.
« Je savais que tu étais doué, mais tu deviens un vrai pro ! Tu sais, je suis capable de reconstituer un crâne réduit en morceau mais ça, c’est bien en dehors de mes capacités ! »
Tu t’approche et viens embrasser la joue de ton frère dans un « Smack » bien audible avant de ricaner.
« Maintenant, va te préparer ! Et hésite pas à te maquiller aussi hein ~ Tu l'as dis, on doit être assortis ! »
C'est vrai quoi, autant sortir la carte des jumeaux, autant la jouer entièrement !
«Je te proposerais bien mon aide, mais tu finirais par ressembler au dessin d’une enfant ! »
C’est vrai. Autant, dessiner un os précis, tu sais faire, autant, dessiner des courbes sur un visage autre que le tien ... Mieux vaux que tu n’essayes pas, pour la sécurité de tous. Ce serait dommage que le pauvre blandinet se retrouve avec un eyeliner planté dans l’œil ...
« Allez, hop hop hop ! Au pas de course ! »
Tu l’encourages en claquant des mains à plusieurs reprises pour qu’il se dépêche. Après tout, sans les Curtis, la fête ne peut pas vraiment commencer ~
@Ezequiel CurtisHere we go