Peace and love, and bagarre

Son message a sonné comme de mauvaises représailles. Un châtiment divin. Comme si tu n'avais pas assez souffert comme ça dans ta vie. Orpheus est la seule personne qui n'est pas un bones pour laquelle tu veux cuisiner. Une intoxication alimentaire, ça ne lui ferait pas de mal à ce fils de bourge. Tu ne sais rien de lui, mais tu es pratiquement certain qu'il n'a jamais rien vécu. C'est du moins ce qu'il dégage. Il est trop posé. Il a la même aura que les monsieur je sais tout. Et tu détestes les monsieur je sais tout.

Quand tu dis que Sam a un entourage sympa, qui n'est pas toxique, tu ne l'inclues jamais dedans. Cela ne sert à rien de préciser systématiquement que tu ne le portes pas dans ton coeur, ça ne ferait que blesser ta soeur. Et il n'est pas nocif non plus. Mais tu ne l'apprécies pas, tu ne le sens pas.

Tu te regardes dans ton miroir. Une serviette autour de la taille, tes cheveux plaqués contre ton crâne à cause de l'eau, tu sors tout juste de la douche. Tu ne peux pas le blairer, pourtant, tu fais en sorte d'être présentable. Même toi, tu ne comprends pas ta logique. Tu te sèches rapidement, t'habille simplement, et te coiffes les cheveux. Tu sors de la salle de bain, et regardes le salon. Ce n'est pas trop le bordel. Mais suffisamment pour que ça le fasse chier. Tu as rangé un peu, tu n'es pas un tyran non plus.

Il toque. Il est là. Malheureusement. Tu prends le temps de ranger quelques derniers détails. Puis tu vas lui ouvrir. Il ne peut pas t'empêcher de te lancer des pics ? Après, c'est vrai que tu dois tirer une gueule de dix pieds de long.

"Sam n'est pas là. Je n'ai pas à faire semblant. Je ne t'apprécie pas, je ne vais pas t'accueillir avec un grand sourire. Mais entre quand même."

Tu le laisses donc entrer dans ton humble demeure. Il va s'installer. Tu t'adosses contre le mur en face du canapé, et croises les bras, la tête légèrement baissée. Ouais, tu le regardes de travers. Et distance de sécurité. Pas de ta faute, tu ne le sens pas ce mec.

"De quoi tu veux parler ? Qu'on fasse ça vite et bien. J'ai pas envie que tu traines ici."

Le silence que tu entretiens n'a rien de rassurant. Le pire, c'est qu'il se permet de continuer. Il ne comprend vraiment rien, à côté de la plaque le minus. Il t'envoie un message. Te dérange en soirée, alors que tu travailles dans quelques heures. Dans un élan de bonté, tu acceptes qu'il vienne -tu ne sais toujours pas pourquoi tu as fait ça- tu te prépares même pour sa venue. Tout ça pour que ce type vienne te faire la morale sur la relation que tu entretiens avec ta soeur. Vous voyez, tu l'avais dit. Il a des allures de monsieur je sais tout.

T'as franchement envie de lui briser les dents. Tu retires ce que tu as dit tout à l'heure : pour venir CHEZ TOI, donc dans un environnement qui n'est pas le sien, loin de Sam, pour te balancer ce genre de choses à la gueule, il a dû affronter la mort un bon nombre de fois. Parce qu'il n'en a clairement pas peur à l'heure actuelle. Tu le saisis par le col, d'un geste vif, et sans qu'il n'ait pu comprendre ce qu'il lui arrivait, il finit contre le mur. Sa tête l'a heurté plus fort que tu ne le pensais, ça t'arrange.

"Ecoute chaton, t'as franchement de la chance que je ne puisse pas t'amocher, j'ai peur que t'ailles chouiner auprès de Sam si je touche à ton joli petit minois de gosse de riche. Aucun de vous n'a conscience de ce dont est capable un bones. Vous ne savez rien, surtout toi. Alors tes leçons de moral, tu te les carres où je pense, sinon, je t'assure que je m'en occupe, et ça ne te fera pas du bien du tout connard."

Tu savais qu'il allait finir contre ce mur. Mais tu ne pensais pas que ça allait arriver aussi tôt. Il est vite arrivé à bout de ta patience. Il dégage réellement quelque chose que tu détestes, mais tu ne sais pas expliquer exactement quoi. Tes poings se resserrent autour de la chemise bien repassé de ton interlocuteur. Comment Sam peut-elle le blairer ? A ce niveau-là, c'est considéré comme un don. Elle est hors norme. Elle doit avoir pitié de lui. Tu te rassures en te disant ça. Il ne doit pas avoir beaucoup d'amis, vu comme il se comporte.

"Putain de merde Orpheus, tu te rends compte du culot que t'as là ? Tu veux que je te réponde quoi à ça sombre enfoiré ? Tu ne sais rien, rien du tout, et tu te permets de me taper la causette. Les justiciers comme toi, j'les connais. Franchement, tu ferais mieux de vite arrêter, parce que ceux que j'ai connus ne sont plus de ce monde."

Tu le lâches. De toute façon, s'il insiste, tu ne retiendras pas le poing. Il va partir dans le bide, ça n'amochera pas sa face de rat.

Tes yeux posés sur ton sol, tu ne sais plus quoi penser des paroles qu'ils prononcent. C'est vrai que tu ne prends plus vraiment le temps de parler à Sam. La dernière discussion sérieuse que vous avez eu, Sam et toi, a été un véritable désastre. Elle a pleuré, toi aussi. Et tu as même déménagé. Alors depuis, tu évites. Ta vie est un sujet sensible. Ta colère s'apaise, un peu. Il n'a pas l'air de penser à mal en te disant tout ça. Il est juste pataud, parce que ce môme n'y connait rien à la vie. Mais tu ne peux pas réellement lui en vouloir.

Il est juste trop proche de Sam. Au fond, tu es sûrement jaloux. Tu retires sa main de ton épaule d'un petit coup, et te laisses tomber sur le vieux canapé.

"J'accepte de parler avec toi. A condition que tu répondes à quelques questions. D'où connais-tu Kaela ? Qu'est-ce que tu sais d'elle ? Qu'est-ce que tu sais de la nature de notre relation ?"

Tu te demandes si ce n'est pas l'évocation de cette personne qui t'a apaisé. Kaela. Il n'y a jamais eu de tension entre elle et toi. Aucun mauvais souvenir. Elle apaise juste ton coeur. Sam aussi, mais c'est... différent. Il y a toujours une crainte, notamment celle qu'elle finisse par se tuer en voulant te sauver. Tu te doutes qu'elle est pleine de bonne volonté, mais elle ne fait pas le poids face aux bones. Elle ne fait clairement pas le poids.

"Et ne vas pas croire que le fait que j'accepte de causer avec toi est bon signe. Le jour où Samantha cessera d'avoir pitié de toi, et te dégagera, je déboucherai une bouteille de champagne, et je fêterai ça convenablement. Et j'ai toujours autant envie d'enfoncer mon poing dans ton joli petit minois."

Tu as toujours autant envie de lui éclater les dents contre la table. Et il n'arrange clairement pas la situation en insistant bien sur le fait que tu es un mauvais frère. Tu ne sais pas si tout ce qu'il te raconte là vient de Sam, auquel cas tu le crois, ou si c'est juste son ressenti. Cela peut aussi être un manipulateur, qui cherche à vous éloigner le plus possible. Toutes les hypothèses sont bonnes. Il faut que tu entres dans son jeu pour voir laquelle est avérer. Ou que tu en parles avec Sam. C'est aussi une possibilité, mais tu n'aimes pas avoir des discussions sérieuses avec elle. Tu n'aimes pas te disputer avec elle.

"Je sais qu'elle tient beaucoup à moi. Qu'elle fonce dans un tas qu'elle ne connait pas, qui est dangereux, dans lequel elle peut perdre la vie, parce que oui, elle est faible face aux bones. Elle n'a clairement pas la carrure, et ça m'énerve que personne ne s'en rende compte. Je sais qu'elle est passionnée par ses études, l'anthropologie judiciaire. Je sais qu'elle a tendance à s'oublier aux profits des autres, enfin, au profit de moi. Qu'elle ne prend pas de temps pour elle. Qu'elle traine dans des rues lugubres la nuit dans lesquelles elle peut se faire planter à n'importe quel moment. Mais qu'elle pense à bien, en faisant ça. Je sais aussi qu'elle a un ami chelou, qui ne sait vraiment pas rester à sa place, et qui permet de venir chez des gens pour critiquer le rôle qu'ils ont à jouer auprès d'une tierce personne, alors qu'ils ne savent réellement rien de la situation."

Tu te prends la tête dans tes mains, et ébouriffes tes cheveux. Tu te redresses, et plantes tes yeux dans les siens :

"Ta démarche est honorable, même si je ne l'apprécie pas. Mais quand tu n'as pas été dans cette situation Orpheus, tu ne peux pas comprendre. Sam ne peut pas comprendre, tout comme je ne peux pas comprendre l'entêtement qu'elle a à vouloir me sortir de là au péril de sa vie. Les bones sont dangereux. Y entrer a été mon erreur. En sortir, tout le monde risque d'en pâtir. J'essaye de la protéger, en limitant les dégâts. J'ai peur des conséquences si je quitte l'organisation."

Tu n'arrives vraiment pas à le cerner. Son calme t'énerve. Même quand il était acculé contre un mur, il ne l'a pas perdu. Il a conservé cet air apaisé, que tu détestes par dessus tout à partir d'aujourd'hui.

"Je parle volontairement uniquement du rapport de Sam aux bones. Parce que c'est en grande partie pour ça que tu es là aujourd'hui. Et que je n'ai pas envie que cette discussion s'éternise, encore une fois. Je taffe, moi.

Bon. Là, il t'a surpris. Il ne t'a clairement pas fait perdre tes moyens, mais c'est une chouette tentative. Si toi, tu ne le connais pas, c'est aussi le cas pour lui. D'ailleurs, il semble avoir plus ou moins un lien avec les bones. Il va falloir que tu enquêtes là-dessus. Mais pour le moment, tu dois te débarrasser de cette vermine. Tu lui lances un sourire, qui n'a rien de cordial. En plus de ça, il ose te donner des surnoms. Tu l'attrapes à ton tour, et retournes la situation. Il est dorénavant couché, en dessous de toi. Tu passes une de ses mèches derrière son oreille, et lui caresses doucement la joue.

"Je peux voir pour libérer mes services ce soir si tu veux, je comprends que tu sois frustré. A défaut d'avoir un Curtis, tu veux essayer de te taper l'autre ? C'est adorable. Par contre, je te préviens, j'suis pas un soumis au lit chaton."

Cela ne sert pas à grand chose de jouer à ce jeu-là avec toi, réellement. Tu en vois des bien pire que lui, pratiquement tous les soirs. Il a été rapide. Trop rapide. Il est vraiment étrange. Tu poses ta main sur son épaule, et appuies légèrement. Oui. Tu dois te tromper à son compte. Il est sûrement bien pire que ce que tu as pu imaginer. Tu le pensais inoffensif : il est dangereux.

"Qu'est-ce que tu caches derrière ce joli petit minois, chaton ? "

Tu augmentes la pression sur son épaule. Il est venu pour te parler de Sam. Le-voilà dans la merde. Parce qu'il va y passer, à l'interrogatoire. S'il a un lien avec les bones, quel qu'il soit, il faut que tu le saches. Et le torturer ne te fait pas réellement peur.

Sam te fait peur par contre.

Tu approches ton visage de celui d'Orpheus. Il n'est pas inoffensif. Mais il ne te fera pas de mal. Lui aussi peut avoir peur de Sam.

"Allez, dis tout, sois un brave garçon. Tu auras une sucette si tu es sage."

Ouais, tu cherches un petit peu à détourner le sujet. S'il peut arrêter de t'insulter, ça t'arrange.