Raconte-moi une histoire (ft Galatée)

Marche droit. Ne plie pas. Être plus forte. Avance. Ne recule jamais devant rien. Tu ne connaitras pas la peur. Tu ne connaitras pas l'amour. Tu ne connaitras ni tristesse, ni colère. Tu ne trembleras pas. Sois forte. Sois puissante. Sois forte. Sois sûr de toi. Ecoute moi. Obéis-moi. Tais-toi. Ne sois rien de plus que ce que je veux que tu sois.

Un pas de plus qui te rapproche de la jeune fleuriste. Un pas de plus qui te rapproche des Wackys. Pourquoi as tu accepté ce rendez-vous ? Tu n'en sais rien. A quoi cette femme peut bien te servir ? Pourquoi t'encombres-tu de complaisances aussi farouches qu'inutiles ? Tu n'en sais rien. Pourtant, c'est un pas de fait, puis un autre. Suffisamment pour faire face à la jolie petite bâtisse. Il va y avoir des gens. Beaucoup de gens.

Tu n'as pas le droit à l'erreur. Personne ne devra briser cette identité que je t'ai offerte. Lysandre. Sois forte Narcisse, ne faiblis pas. Oublie-toi. C'est pour la bonne cause. Ne doute pas. S'il commence à s'installer, tue-le.

Tu évites de justesse un homme bien trop affairé à regarder sa petite montre. Ton lien avec Galatée était purement professionnel. A la base. Mais voilà que tu te retrouves à devoir aller savourer des milshakes avec la jeune femme. A quel moment ça a déraillé ? Tu n'en sais rien. Tu ne sais plus. Et pour une fois, tu l'avoues : tu ne l'as pas vu venir. C'est un problème que tu dois rapidement résoudre.

Trouver la faille. S'infiltrer. La briser de l'intérieur sans qu'elle ne s'en rende réellement compte. Elle finira par lâcher prise, par se lasser de tout. En tout cas, tu mettras tout en oeuvre pour que votre amitié tombe en ruine aussi rapidement qu'elle a été bâti.

Tu fais dorénavant face au petit café. Elle est déjà là. Pourtant, tu es en avance. A croire qu'elle avait hâte de te voir... Quelle tristesse. Tu pousses un profond soupir, puis t'armes de ce masque si familier. Lysandre

Sois forte. Ne faiblis pas. Ronge la. Détruis tout avec que cela ne te détruise toi. Tue.

Tu arbores un grand sourire, pousse la porte. Tu rejoins rapidement la jeune femme. Narcisse n'est plus. Seule Lysandre compte à l'heure actuelle. Tu te poses en face de Galatée et lâche d'une voix fluette : « Salut beauté~J't'ai pas trop fait attendre ? J'espère que je ne t'ai pas trop manqué~ Je suis ravie de te voir en cette belle journée ensoleillée ! Qu'est-ce que tu racontes de beau ?»

Tu poses ta tête sur ta main et la regarde attentivement. Un petit sourire de chat sur les lèvres, tu penses Lysandre, tu vis Lysandre, tu respires Lysandre.

Tous les humains ont une nature plus ou moins mauvaises, ils l’expriment chacun d’une manière différente. Certains s’amusent à détruire les carapaces des pinces de crabes pour en extraire la chair, d’autres… offrent et vendent des cadavres de fleurs. Parce que ce ne sont rien de plus que des fleurs mortes, qui faneront dans un vase au milieu d’une table dans un salon où personne ne leur accordera l’attention qu’elles méritent. Cependant, aucune trace de cette réflexion existentielle n’habite tes traits. Tu poses une main contre ta bouche en lâchant un petit : « Il ne fallait pas Galatée, merci beaucoup ! Je n’ai rien prévu moi ! »

En même temps, tu as d’autres choses à faire que de perdre de l’argent à offrir des fleurs à la jeune femme. Bien que ça devrait lui faire grandement plaisir… Bon, tu verras la prochaine fois. Tu attrapes délicatement le petit bouquet, lâchant des rires qui te feraient presque gerber tant ils sont niais. Rire d’autant plus niais que tu connais sur le bout des doigts la signification de chacune des fleurs qui peuplent ce monde. « Un amour sincère, puissant… » En même temps, tu as d’autres choses à faire que de perdre de l’argent à offrir des fleurs à la jeune femme. Bien que ça devrait lui faire grandement plaisir… Bon, tu verras la prochaine fois. Tu attrapes délicatement le petit bouquet, lâchant des rires qui te feraient presque gerber tant ils sont niais. Rire d’autant plus niais que tu connais sur le bout des doigts la signification de chacune des fleurs qui peuplent ce monde.   « Un amour sincère, puissant… »

La malice gagne ton regard, tandis que tu poses doucement le bouquet à côté de toi, puis ta tête dans le creux de ta main. Tu lui adresses un clin d’œil, attrapes doucement sa main et y déposes un baiser. Lysandre est vraiment aux opposés de la personne que tu es naturellement… Et ça devient de plus en plus amusant de jouer ce rôle-là ! C’est faux. Tu tentes simplement de te convaincre. Tu détestes Lysandre. Tu la détestes plus que tout. Mais tu ne dois pas l’abandonner : si tu survis, c’est uniquement grâce à elle. « Mais sage. On l’offre à l’être aimé pour lui faire sa déclaration. Elle est bien moins passionnelle que ses copines rouges, c’est un amour pure, mais extrême, et idéalisé. »

Tu dégages délicatement une des tulipes du bouquet, sans pour autant le détruire. Tes gestes sont assurés, précis : Tu as ça dans le sang. Tu en sens la douce odeur : même ça, ça n’a pas grande valeur à tes yeux. Un cadavre qui sent bon, rien de plus. « Est-ce que tu m’idéalises, Galatée ? »

Oui. Elle t’idéalise, Narcisse. Elle t’idéalise, elle pense que tu es Lysandre. Si elle savait… Si elle savait à quel point tu n’es rien de ce qu’elle peut imaginer. Si elle savait à quel point tu n’es rien. Rien qu’une enveloppe vide, condamnée à ne jamais faire entendre sa voix, simplement porteuse du message de son acquéreur. Tu le vis bien, tu ne t’en plains pas. Tu as eu de la chance de tomber sur ton père : il n’est pas si mauvais que ça. Ses objectifs sont justes, et il t’aime, plus que tout. Il fait tout ça pour ton bien, alors tu as cessé de chercher à comprendre, tu suis simplement le chemin qu’il t’a indiqué. « J’te taquine ! Bien que ce soit réellement la signification des tulipes blanches… »

Lysandre pourrait se tromper. Toi, la probabilité est 100 000 fois plus minime… Et étant donné que le savoir de Lysandre dépend du tien… Tu ne connais pas les sources des Lycoris Rouges, tu ne sais pas d’où ils tirent leurs informations, mais tout est toujours tellement justes que tu ne les as jamais remis en question. Toi, tu te contentais de lire bêtement, d’engranger par cœurs des milliers de pages, au mot près, à la lettre près. « Dans l’Enfer, les places les plus brûlantes sont réservées à ceux qui, en période de crise morale, maintiennent leur neutralité. » Lorsque tu as lu ce vers plus jeune, tu te souviens avoir eu peur. Tu te souviens de ton regard qui dévisage gravement ton père, tandis que tes doigts ont été pris de tremblements, puis tes bras, puis ton corps. Tu as eu peur. Tu as craint que cette neutralité t’empêche de revoir ta mère, un jour ou l’autre. Cette mère qui a eu sa place au Paradis dès sa naissance tant elle n’était que bonté, amour, altruisme, joie et paix. Elle ne connaissait pas la colère, tous ses sentiments étaient purs, honnêtes, authentiques. Elle n’a jamais fait semblant. Tu ne voulais pas de cette place en Enfer. Et maintenant, tu sais que tu y es condamnée. Et tu as accepté, tu ne t’en excuses pas, ta mère ne t’en voudra pas. Puis, de toute façon, elle n’a pas le choix, alors qu’elle pleure, ses larmes ne te toucheront plus. Ses larmes, tu ne les verras jamais : elle est condamnée à vivre en silence ce que tu vis en silence depuis sa disparition : le deuil de sa fille, qu’elle observe depuis les cieux crever à petit feu, descendre plus profondément dans les Enfers, n’être que le misérable pantin d’un père qui n’en a jamais rien eu à foutre d’elle. Ça, tu l’ignores. Tu ignores totalement le fait que ton père ne t’aime pas réellement, tu te dis simplement que tu n’es pas encore assez forte, que tu ne mérites pas encore les petits moments que vous passiez ensemble lorsque tu n’étais qu’une enfant joyeuse.

Tu divagues. Tu divagues totalement, mais tu ne laisses rien transparaitre. Tu sembles bel et bien pensive, mais elle pensera simplement que tu réfléchis au sens de ces fleurs, fleurs dont tu te fous royalement soit dit en passant. Elles ne sont qu’un des nombreux savoirs qu’on t’a impliqués, leurs vies n’est pas plus importantes que la tienne, elles n’ont strictement aucune valeur à tes yeux. Elles ne sont que ta couverture, rien de plus. Tu sors de ce qui semble être des rêveries, et ajoutes : «« Peut-être une signification italienne que j’ignore… Je ne suis pas la science infuse, je peux me tromper, mais c’est que ce que la tulipe m’inspire en général. Je n’ai jamais entendu parler d’une quelconque signification au sujet de cette fleur qui parlerait d’amitié… Mais c’est le sens que tu leurs donnes, alors c’est le sens que je garderai. Je tâcherai de noyer mon chagrin amoureux dans autre chose que de l’alcool, c’est promis. »

Puis, elle se lance dans une tirade philosophique qui t’aurait probablement fait soupirer si tu ne portais pas ce masque. L’ironie de la situation te ferait presque rire. S’il a bien une personne dans cette pièce qui voit ce qu’elle veut dire, c’est bien toi. C’est plutôt elle qui parle sans savoir. Tu ne montres même pas réellement ce que tu as envie de montrer de toi, c’est bien plus radical que ça. Narcisse n’existe tout simplement pas lorsque tu es Lysandre. Lysandre n’est absolument pas inspirée de Narcisse, vous n’avez aucun points communs, vos goûts sont radicalement différents. Vos voix n’ont rien à voir entre elles : lorsque tu es Lysandre, tu camoufles ce grain de voix qui est le tien. C’est un peu compliqué, mais tu as pris l’habitude. « Je suis une personne horrible, te lancer de telles fantaisies philosophiques ! Vilaine Lysandre, vilaine ! » Tu assènes à ta propre main une petite tape, comme pour te punir d’avoir oser lancer la pauvre femme dans des délires aussi farfelus que stupides. « Plus sérieusement, tu n’as pas à te retenir avec moi, je trouve ça intéressant… Puis, ça te donne un côté vraiment craquant ! Je suis même plutôt d’accord avec toi, ça a un côté rassurant de cacher certaines choses »

Pour les autres. Ce sont les autres que tu rassures inconsciemment. Combien fuirait s’ils savaient ? Combien ? Tu n’en sais rien, tout ce que tu sais, c’est qu’ils arrêterait de s’approcher de toi comme ils le font. Que ce mec au fond du bar arrêterait de te reluquer comme un chien en rut, que les enfants ne riraient certainement pas sur ton passage comme ils le font en temps habituel. Bon point : tu aurais plein de places libres dans les transports en commun. Qu’est-ce que tu détestes quand les gens te collent, c’est une infection qui te donne envie de déposer des bombes et de te casser en courant avant que ça ne fasse « boom ».

Tu diverges encore. « J’aime vraiment beaucoup tes bagues ! Une chose est sûre, si je dois t’offrir quelque chose un jour, ce ne sera certainement pas des fleurs, j’ai un moyen bien plus efficace de toucher ton cœur~ Puis, ça te va vraiment à ravir ! Déjà que t’es super belle, mais ça… aaah, j’en perds mes mots ! »

A vomir. Cette niaiserie. A gerber.

Tout semble si naturel chez elle. Ses réactions sont si humaines, si spontanées. Elle a la sensibilité de ta mère. Tu ne sais pas pourquoi tu t’acharnes à parler avec elle, ça n’a pas grand utilité. Tu as une petite partie de la réponse : ta mère. Encore et toujours. Elles partagent ce petit côté rassurant et apaisant. Galatée n’a rien à voir avec cet être qui t’a donné la vie outre ça, sa faiblesse est tout autre. Elle est plus profonde, plus ancrée. Elle lui fait tourner la tête, au point d’en oublier l’essence même de son travail : les fleurs. Tu ne te serais pas trompée, à sa place. L’erreur est fatale dans ton monde. Elle aurait pu se prendre une balle dans la tête pour aussi peu.

L’erreur est humaine, mais on ne vous demande pas d’être humain. Des machines sans émotions, pouvant jouer n’importe quel rôle à la perfection. Si tu le voulais, tu pourrais copier précisément chaque mimique de la jeune femme. Tu as absolument tout analysé : sa manière de respirer. Jeune femme aux apparences calmes et à la respiration saccadée : un tableau fortement mal réalisé, aux traits flous, un enfant aurait pu faire mieux. Ce besoin de tapoter ce qu’elle a à portée de main lorsqu’elle est gênée, elle a tendance à légèrement regardé à droite lorsqu’un sujet lui déplait, sans oser réellement le dire. Elle cligne régulièrement des yeux, bien plus que toi en tout cas. Tous ces détails, il ne t’échappe jamais. Parce que chaque personne de ce monde est une potentielle ennemie, ou une potentielle victime. Que si ton père vient à t’ordonner de la tuer, tu le feras dans la seconde sans hésitation, et que tu le feras bien, parce que tu la connais, et qu’à partir de là, tu peux deviner chacun de ses agissements : l’humain cherche désespérément à oublier sa nature : c’est un animal. Un animal qui, poussé par l’instinct de survie, a des mécanismes bien précis, qui sont facilement devinables. On t’a élevé dans la peur, pour que tu appréhendes cet instinct de survie, et que tu le neutralises. Il n’en reste plus rien aujourd’hui, tu n’es que néant sentimental. Tu contrôles parfaitement le moindre de tes mouvements, la moindre de tes actions.  

Tu t’enfonces dans ta chaise et te balances doucement, jouant avec une de tes mèches. Un petit rire passe la barrière de tes lèvres : « Je n’aime pas particulièrement parlé de moi, c’est surtout pour ça que tu ne sais pas grand-chose ! Chaque personne ne montre que ce qu’elle a envie de montrer d’elle, pour te citer. » Tu lui adresses un nouveau clin d’œil un petit peu plus malicieux que les autres. « Oh, tu as eu l’impression que je cherchais à m’en cacher ? »

Pourquoi fais-tu tout cela, Narcisse ? Il serait temps que tu trouves une réponse à cette question : c’est même urgent. Elle te plonge dans une situation délicate, tu n’as strictement aucun intérêt à trainer avec elle, et tu ne la trouves pas particulièrement intéressante qui plus est. Peut-être as-tu besoin d’une piqure de rappel ? Te rappeler que jamais tu ne devras lui ressembler, jamais tu ne devras être aussi faible.

Les bijoux. Encore une chose que tu ne comprends pas. Tu ne trouves pas spécialement que ça embellit les gens. Ne sont-ils définitivement que la démonstration d’une certaine richesse ? Tout œil connaisseur et intéressé saura séparer le faux du vrai, le véritable or du contreplaqué. La population se base constamment sur des critiques terriblement… futiles, comme les richesses. Non. Tu ne trouves pas ça beau, ni intéressant, ça coute juste de l’argent pour toi. « Ew, tu veux déjà me relooker ? Je ne sais pas comment je dois le prendre ! Tu les portes magnifiquement, mais ce n’est pas trop mon délire tout ça ! J’ai juste l’impression que ça va perturber mes mouvements, et je déteste ne pas sentir libre ! »

Quelle ironie. Tu n’as toujours connu que les cages. Platon ne t’a pas encore sorti de ta caverne, alors comment peux-tu remarquer que tout ça, ce n’est pas ce que le commun des mortels appellent « la liberté » ? Pour toi, ils sont enchainés à leurs émotions, ils en sont totalement dépendants. Leur liberté n’est qu’une contrefaçon.

Si tu savais à quel point tu te trompes, ma Narcisse.

Unique. Se cacher au monde. Tu baisses les yeux, et sembles t’éteindre pendant quelques instants, attrapée par un flot que tu n’arrives pas à contrôler lorsque Galatée est là. Tes doigts jouent avec une de tes mèches. Oui, tu te caches au monde. Tu es de ces êtres que l’on ne voit pas, que l’on ne remarque pas, qui ne marquent pas les esprits. Tu es de ces êtres que l’humain a enfoncés, a fait disparaitre à coup de maltraitance, d’injures. Tu es cette enfant qui a pleuré toutes les larmes de son corps devant le cercueil de sa mère, qui a hurlé de peur face au monstre qu’elle a découvert à sa mort, hurlé de douleur et d’incompréhension lorsqu’il t’a fait subir ce premier entrainement, lorsqu’il a passé sa main contre ta joue avec tendresse pour te rassurer, te dire que bientôt, tu ne seras plus cette enfant faible qui craint de se faire un bobo, qui craint de faire le mal, qui craint de faire le bien. Que bientôt, tu sauras, tu sauras quelle est ta mission sur cette Terre, lorsque tu seras prête, tu pourras enfin être utile. Efficace. Bien plus qu’un humain, bien plus que ces machines de guerre minutieusement fabriquées par le gouvernement.

Tu n'écoutes même pas ce qu’elle te dit ensuite. Tu entends ses paroles, mais tu ne l’écoutes pas. Repensant à cette enfance unique que tu as eue. Tu ne la regrettes pas, ton père a fait ce qui était le mieux pour toi. Pour lui. Pour vous. Et un jour, tu retrouveras cet être aimant qu’il était. Tu auras son éternel reconnaissance, tu reverras son sublime sourire. Tu ne vis que dans cet espoir-là, rien d’autre. Le retrouver, ton père. Et ça, tu le sais, que c’est une faiblesse. Mais c’est comme le manque, celui que tu ressens au sujet de ta mère, tu ne peux les dominer. Tu les contrôles, mais ils sont toujours là, peu importe ce que tu fais. « Tu… n’as pas tort. Mais parfois, c’est plus simple de se cacher aux autres, ça fait moins mal… »

Ton attention se porte sur l’extérieur, les passants. Des personnages secondaires de ta vie. Galatée aussi n’est qu’une passante. Une passante simplement plus présente que ceux qui marchent activement dans la ruelle adjacente. Elle passe moins rapidement, t’accorde des sourires, de l’attention. Enfin, c’est ce qu’elle accorde à Lysandre. Elle t’en voudrait probablement si elle connaissait Narcisse, elle aurait peur. Et elle passerait. Elle se mêlerait à cette foule sans sourire.

Et ce sera bien mieux comme ça. « Excuse-moi, j’me suis perdue dans mes pensées ! Vas-y, prends, c’est moi qui paye ! Je connais ton amour pour cette boisson ! » Tu serais presque désolée, parfois. Désolée qu’elle ne soit amie qu’avec une simple illusion. Tu ne peux pas l’aider, tu n’es pas réelle. Tu es ce qu’il veut que tu sois, rien de plus. Tu ne dois te laisser aller à aucune émotion. Contrôle. Maitre mot de ta pauvre vie. « Et je ne vais pas te rassurer, mais tes yeux ne montrent pas grand-chose non plus. C’est faux de dire que les yeux sont le reflet de l’âme, il n’y a rien de moins subjectif que le regard. Certaines émotions fortes se voient réellement, mais tout ce qui ne l’est pas, qui tire du banal comme la simple joie, la simple tristesse, la simple colère, c’est trop faible pour être réellement visible. »